écritures contemporaines

Dominique Viart, Anthologie de la littérature contemporaine française : Romans et récits depuis 1980, Armand Colin, 2013.

Depuis plus de trois décen­nies, la lit­té­ra­ture fran­çaise connaît un pro­fond renou­vel­le­ment de ses enjeux et de ses formes. Nous vivons là une période d’intense richesse lit­té­raire : les écrivains se sont res­sai­sis du monde, de l’his­toire. Ils bous­cu­lent les modè­les roma­nes­ques, pro­po­sent de nou­vel­les voies à l’écriture de soi, ouvrent d’autres espa­ces à la fic­tion. Mais tous n’ont pas encore trouvé l’audience qu’ils méri­tent… Véritable invi­ta­tion à la lec­ture, la pré­sente antho­lo­gie s’offre à les faire décou­vrir.



Robert Dion et Frédéric Regard (dir.), Nouvelles écritures biographiques, ENS éditions, 2013.

La bio­gra­phie d’écrivain (sur un écrivain par un écrivain) est un genre qui a de très lon­gues raci­nes his­to­ri­ques, mais qui a connu, au cours des vingt-cinq ou trente der­niè­res années, un déve­lop­pe­ment ful­gu­rant. C’est sans doute la levée post­struc­tu­ra­liste de l’inter­dit concer­nant la per­sonne de l’auteur qui a permis, tout au moins en France, la résur­rec­tion d’une écriture bio­gra­phi­que légi­ti­mée. On date en géné­ral cette renais­sance du mitan des années 198o alors que, coup sur coup, Duras, Robbe-Grillet et Sollers don­naient des textes (auto)bio­gra­phi­ques au statut certes pro­blé­ma­ti­que mais néan­moins assumé. Savamment entre­tenu par des incur­sions dans le roma­nes­que, par des trans­po­si­tions diver­ses et par des nos­tal­gies géné­ri­ques nom­breu­ses, ce flou géné­ri­que appa­raît d’ailleurs comme une carac­té­ris­ti­que majeure de la pro­duc­tion bio­gra­phi­que de l’après-1980- de ces écritures que nous dési­gnons comme « nou­vel­les ». Le lec­teur trou­vera ici des ana­ly­ses d’une pro­duc­tion qui veut bien renouer avec la figure de l’auteur, mais qui n’entend pas être dupe de ses cha­toie­ments. L’« illu­sion bio­gra­phi­que » (Bourdieu) a bel et bien vécu, et de nom­breux bio­gra­phes contem­po­rains savent désor­mais que la vérité de l’autre ne peut être appré­hen­dée que par le jeu des formes (ou par le jeu avec la mémoire des formes), si ce n’est, pour dire comme Lacan, « dans une ligne de fic­tion ».



Gilles Bonnet (dir.), L’Inactualité. La littérature est-elle de son temps ?, Paris, Hermann, 2013.

De quoi la lit­té­ra­ture est-elle contem­po­raine ?

Doit-elle être de son temps pour se penser légi­time ? Ou s’accorde-t-elle un droit à l’inac­tua­lité, non tant pour fuir le pré­sent que pour mieux venir le ques­tion­ner – voire l’inven­ter ? S’abs­traire n’est pas for­cé­ment s’abs­te­nir : intem­pes­tif, l’écrivain tend à forger une œuvre sus­cep­ti­ble de s’ins­crire plei­ne­ment dans notre moder­nité.

Anachronismes, dyschro­nies, dépha­sa­ges : autant de dépri­ses par quoi tenir en res­pect l’opa­cité du simul­tané et des­ti­ner le texte lit­té­raire à une quête sans fin d’un pré­sent peut-être insai­sis­sa­ble. Ce volume réunit les contri­bu­tions d’une tren­taine de spé­cia­lis­tes de la lit­té­ra­ture et des arts du XVIIIe au XXIe siècle.

« Ne ferais-je pas mieux de dire autre chose, même si ce n’est pas encore ce qu’il faut ? » s’inter­ro­geait Beckett : « je vais essayer, je vais essayer dans un autre pré­sent, même si ce n’est pas encore le mien »…

Autant dire : je pré­fè­re­rais ne pas encore, ou ne plus.

Disons : inac­tua­lité, à charge d’inven­taire.

Vous pouvez retrou­ver sur le site un entre­tien avec Gilles Bonnet qui permet d’expli­ci­ter le projet à l’ori­gine de cette riche publi­ca­tion.



Bruno Blanckeman & Barbara Havercroft (éds.), Narrations d’un nouveau siècle. Romans et récits français (2001-2010), Paris, Presses Sorbonne nouvelle, 2013.

En août 2011 s’est tenue à Cerisy-la-Salle une décade « Narrations d’un nou­veau siècle : romans et récits fran­çais, 2001-2010 » dont ce livre cons­ti­tue les actes. À quoi res­sem­ble une lit­té­ra­ture qui accorde la part belle au roman mais sans exclu­sive géné­ri­que, dans la concur­rence de récits emprun­tant à tous les genres et de mul­ti­ples arts ? Une lit­té­ra­ture fran­çaise parce qu’écrite en langue fran­çaise, mais tra­vaillée de l’inté­rieur et ren­voyée à sa propre étrangeté par les évolutions de cette langue et les poro­si­tés mul­ti­cultu­rel­les que sus­ci­tent aujourd’hui des échanges mon­dia­li­sés ? L’ouvrage ras­sem­ble les points de vue d’uni­ver­si­tai­res euro­péens, cana­diens et amé­ri­cains. Il se veut un obser­va­toire cri­ti­que des évolutions en cours de la lit­té­ra­ture et un labo­ra­toire théo­ri­que ouvert à dif­fé­ren­tes appro­ches per­met­tant d’en mesu­rer les enjeux en temps réel.



Jean-Bernard Vray et Jutta Fortin (dir.), L’’imaginaire spectral de la littérature narrative française contemporaine, Saint-Étienne, Presses universitaires de Saint-Étienne, 2013.

Les thèmes de la han­tise, du spec­tral sont insis­tants dans la lit­té­ra­ture nar­ra­tive fran­çaise contem­po­raine depuis une tren­taine d’années. S’il y eut, en réfé­rence à l’his­toire et au « mes­sage noir des camps » (Cayrol), un ima­gi­naire spec­tral de la lit­té­ra­ture après 1945 ; l’inves­tis­se­ment actuel de la spec­tra­lité ne se limite pas à l’impli­ca­tion de la réfé­rence à l’uni­vers laza­réen, ni à l’his­toire. Convoquant volon­tiers l’image pho­to­gra­phi­que et ciné­ma­to­gra­phi­que, l’ima­gi­naire spec­tral se réfère également avec insis­tance aux fan­tô­mes privés qui deman­dent asile au texte lit­té­raire, per­met­tant ainsi le retour d’un refoulé aussi bien indi­vi­duel que social et his­to­ri­que.

Les textes (études, entre­tiens avec Jean-Christophe Bailly et Alain Fleischer, texte d’Yves Ravey) réunis dans ce volume mon­trent com­ment et pour­quoi la lit­té­ra­ture nar­ra­tive, en l’espace de deux géné­ra­tions, selon des esthé­ti­ques variées et inven­ti­ves, dans des écritures fémi­ni­nes et mas­cu­li­nes qui recou­rent à divers genres, ne cesse de décli­ner le thème de la han­tise, dans le nouage des fan­tô­mes indi­vi­duels et des fan­tô­mes col­lec­tifs.