écritures contemporaines

Quels sont les liens aujourd’hui entre l’éditeur et son écrivain ? Est-ce que les modi­fi­ca­tions du pay­sage éditorial ont modi­fié ces rela­tions ? telles sont les ques­tions aux­quel­les ten­tent de répon­dre ces ren­contres, en invi­tant tour à tour écrivains, uni­ver­si­tai­res spé­cia­lis­tes de l’édition et éditeurs. Cette série de ren­contres est orga­ni­sée en par­te­na­riat entre l’Institut d’Histoire du Livre et la Bibliothèque de la Part-Dieu de Lyon. Programme 2010-2011 : Bertrand Fillaudeau et Fabienne Raphoz pour les éditions Corti ; Olivier Bessard-Banquy qui évoquera les éditions Gallimard à l’occa­sion de leur cen­te­naire ; et Pierre Michon qui à tra­vers la figure de Gérard Bobillet des­si­nera le por­trait des éditions Verdier.



Mémoire contemporaine de l’édition 5 : Rencontre avec Didier Blonde

Mercredi 21 mars à la Bibliothèque Part-Dieu, 18h30

Didier Blonde est un détec­­tive de la mémoire, tant ses livres tour­­nent sans relâ­­che autour d’un sou­­ve­­nir man­­quant mais obsé­­dant. Son œuvre peu­­plée de fan­­tô­­mes et aiman­­tée par quel­­ques sil­­houet­­tes roma­­nes­­ques emboîte cer­­tai­­ne­­ment le pas aux flâ­­ne­­ries de Perec, Sebald ou Modiano qui savent si bien com­­bien les sou­­ve­­nirs s’ancrent dans les lieux et élisent domi­­cile parmi nous.

C’est pour­­quoi il s’agit tou­­jours dans ses livres de mener l’enquête concrè­­te­­ment, pour suivre à la trace l’ombre d’une actrice du muet ou aller rôder aux alen­­tours des domi­­ci­­les pari­­siens de per­­son­­na­­ges fic­­tifs. Tout se passe comme s’il repre­­nait à son compte la recom­­man­­da­­tion de Lautréamont qu’il cite en ouver­­ture de son Répertoire des domi­­ci­­les pari­­siens de quel­­ques per­­son­­na­­ges fic­­tifs de la lit­­té­­ra­­ture : « Allez-y voir vous–même si vous ne voulez pas me croire. » Voilà pour­­quoi Didier Blonde se fait car­­to­­gra­­phe de la lit­­té­­ra­­ture, en sui­­vant à la trace Baudelaire de sa der­­nière demeure jusqu’à son lieu de nais­­sance dans Baudelaire en pas­­sant, ou en démê­­lant l’écheveau des habi­­ta­­tions roma­­nes­­ques qu’il nous permet de visi­­ter au fil de son récent Carnet d’adres­­ses.

Ce n’est sans doute pas un hasard s’il a publié quatre de ses livres dans la col­­lec­­tion « L’un et l’autre » diri­­gée par J.-B. Pontalis. Car cet éditeur, qui est aussi un mer­­veilleux psy­­cha­­na­­lyste, pro­­pose aux lec­­teurs une col­­lec­­tion, où les iden­­ti­­tés se brouillent et l’esprit s’égare à recher­­cher un passé qui s’efface : « visa­­ges oubliés, noms effa­­cés, pro­­fils perdus ». Surtout, Didier Blonde et son éditeur par­­ta­­gent une pensée de l’intime comme espace et topo­­gra­­phie, mais si le psy­­cha­­na­­lyste pri­­vi­­lé­­gie la méta­­phore théâ­­trale d’une « scène inté­­rieure », c’est au dédale urbain que Didier Blonde emprunte avec pré­­di­­lec­­tion l’image de l’esprit.



Mémoire contemporaine de l’édition 4 : Rencontre avec Patrick Mauriès et les éditions Le Promeneur

Vendredi 3 février à la Bibliothèque Part-Dieu, 18h30

À propos de sa revue Le Promeneur, qu’il a fondée en 1981 sur le modèle des gazet­tes lit­té­rai­res du XVIIIe siècle, Patrick Mauriès dit « c’était une petite feuille qui parais­sait tous les mois et reflé­tait ma biblio­thè­que réelle et ima­gi­naire ».

À propos des éditions Le Promeneur, créées en 1988 au sein de Quai Voltaire avant de passer dans le groupe Gallimard, « Seuls nous impor­taient les ano­ny­mes des biblio­thè­ques, les œuvres innom­bra­bles que n’avait pas rete­nues, fos­si­li­sées, la théo­lo­gie de la lit­té­ra­ture, ces sty­lis­tes admi­ra­bles qu’obli­té­rait pro­vi­soi­re­ment l’étiquette de ‘mineurs’. Il nous reve­nait de répa­rer les oublis, de repor­ter au jour les œuvres enfouies, de trou­bler les hié­rar­chies, les images exem­plai­res des­ti­nées à faci­li­ter l’admi­nis­tra­tion géné­rale des let­tres… »

À propos de son propre tra­vail d’écrivain : « J’ai tou­jours été inté­ressé par les formes lit­té­rai­res mixtes, mais aujourd’hui je cons­tate que j’aug­mente petit à petit la dose de fic­tion, que je me sens plus libre dans ce domaine, où mon maître absolu reste Marcel Schwob », et : « Ce n’est pas le pur roma­nes­que qui m’inté­resse, mais la fic­tion mêlée à la réflexion ».

À propos de lui-même, qu’il est un « être de fron­tière, irré­gu­lier ».

Pour mémoire, Patrick Mauriès a écrit, seul ou accom­pa­gné, une cin­quan­taine de livres. Il a fondé avec Franco Maria Ricci la revue FMR, a tra­vaillé pour Thames & Hudson. Le cata­lo­gue du Promeneur compte à peu près trois cents titres. Il nous a fait lire les œuvres com­plè­tes de Kleist et d’Olivier Larronde, et aussi Palazzeschi, Soldati, Ennio Flaiano et Manganelli, Mario Praz et Federico Zeri, l’Anglais Peter Ackroyd et l’Autrichien Friedrich Glauser, Erwin Panofsky, de curieux auteurs de curio­si­tés et des liber­tins érudits…